lundi 26 janvier 2015

Ouverture du procès Bettencourt sous haute tension

Le premier procès dans l’affaire Bettencourt s’est ouvert ce matin au tribunal correctionnel de Bordeaux dans la confusion la plus totale. De nombreux personnages clefs de l’affaire manquent à l’appel. Sur le banc des parties civiles, Liliane Bettencourt, qui n’est pas apparue en public depuis 2012, est représentée par son administrateur ad hoc. Sa fille, Françoise Meyers-Bettencourt et ses deux fils, parties civile, ne disent pas un mot. Du côté des prévenus, dix hommes sont poursuivis – dont l’ancien ministre sarkozyste Eric Woerth – mais deux manquent à l’appel : Carlos Cassina Vejarano et Alain Thurin.

Le premier a envoyé un certificat médical pour excuser son absence. Quand le deuxième est appelé à la barre, le procureur, Gérard Aldigé, se gratte la gorge : « Nous avons appris que M. Thurin aurait tenté d'attenter à ses jours hier, par pendaison, dans un bois près de son domicile, en Essonne ». Silence glacial dans la salle d’audience. « Nous ne savons pas s’il est mort ou vivant », poursuit le président du tribunal, Denis Roucou. D’après une source policière citée par l’AFP, l’ancien infirmier personnel de Liliane Bettencourt serait « entre la vie et la mort » à l'hôpital d'Arpajon. Il aurait été découvert dimanche par un passant dans un parc de Brétigny-sur-Orge. Son pronostic vital est « engagé ».

Ce retraité de 64 ans comparaissait sans avocat devant le tribunal, où il est poursuivi pour avoir été désigné, dans le testament de Liliane Bettencourt, comme le bénéficiaire de 10 millions d’euros – somme qu’il n’a jamais touché. Il est également accusé d’avoir aidé l’avocat Pascal Wilhem dans son abus de faiblesse, en isolant la milliardaire de sa famille et du reste de son personnel. Les renseignements de personnalité de l’ordonnance de renvoi devant le tribunal évoquent un homme marié depuis trente-cinq ans avec une infirmière aujourd’hui à la retraite, père et grand-père deux fois. « Après une enfance aux conditions matérielles et affectives difficiles, il a obtenu le concours d’agent hospitalier puis a passé avec succès le concours interne d’infirmier », écrivent les juges d’instruction.

Absents également, un certain nombre de témoins qui n’ont pas daigné faire le déplacement jusqu’à Bordeaux – « Ils auraient pu envoyer une lettre au tribunal » s’agace le président - et surtout, la principale d’entre eux, Claire Thibout, ex-comptable de la milliardaire, mise en examen pour faux témoignage dans une procédure toujours à l’instruction à Paris. Un certificat médical précise qu’elle ne pourra assister à l’audience. Les avocats de la défense s’étonnent de cette affirmation qui date du 7 janvier et comptent dès demain matin demander un renvoi de l’audience, le temps que la procédure parisienne prenne fin.

Après huit années de rebondissements, le premier volet dans cette affaire tentaculaire se présente donc devant la justice dans un climat de haute tension. D’abord médiatique - 150 journalistes accrédités - mais aussi juridique avec des menaces de renvoi du procès. La défense, qui espère visiblement renvoyer le procès aux calendes grecques, multiplie les incidents de procédure. Ce matin, les avocats de François-Marie Banier et Patrice de Maistre ont déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Le tribunal s’est retiré pour délibérer et dira demain matin si la QPC est « sérieuse » et si elle doit être transmise à la Cour de cassation. Cette décision entraînerait le renvoi du procès, mais le ministère public a d'ores et déjà prôné son rejet.

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